Quia nominor leo (03/02/2016)
Comment ce lilliputien, cet homoncule, ce non-être qu’est le directeur diocésain a-t-il réussi à faire la pluie et le beau temps, à devenir le grand maître et le tuteur des écoles, sur lesquelles il s’est arrogé un droit de vie et de mort ? En s’appuyant sur une instance méconnue, un organe administratif monstrueux (mais génial) qui enferme et neutralise tous les acteurs légitimes des écoles catholiques : le C.O.D.I.E.C.
Ces mystérieuses initiales désignent le comité diocésain de l’enseignement catholique, qui « détermine, à partir des orientations diocésaines, la politique de l’enseignement catholique du diocèse », selon les statuts dudit enseignement catholique. Il doit y avoir une nuance entre les « orientations » de l’évêque et la « politique » déterminée par le C.O.D.I.E.C. Mais elle n’est pas définie.
Le C.O.D.I.E.C. détermine cette politique de trois manières : « en choisissant les voies et moyens de la mise en œuvre des orientations diocésaines ; en articulant les priorités diocésaines avec celles de la région ; en inscrivant les choix retenus dans les perspectives plus larges du national ».
Qu’il choisisse à la fois les voies et les moyens trahit une singulière conception de la séparation des pouvoirs (sans laquelle, dit-on, il n’y a point de constitution). Par conséquent, pourquoi prendre la peine de rédiger des statuts ? Qui choisit à la fois ce qu’il faut faire et comment le faire, tout en tenant les cordons de la bourse, a tous les pouvoirs. Et même un peu plus, car il doit « articuler » les priorités diocésaines avec celles de la région. Mais quand les priorités diocésaines diffèrent de celles de la région, qui tranche ? Le C.O.D.I.E.C. Il « inscrit » ensuite les choix retenus dans « les perspectives plus larges du national ». Et quand les priorités diocésaines ou régionales diffèrent des perspectives du « national », qui tranche ? Le C.O.D.I.E.C.
Le C.O.D.I.E.C. a donc tout pouvoir. Mais tout, ce n’est pas assez. Comme rien n’est laissé au hasard, il exerce encore « notamment » six compétences particulières.
1° « Assurer la mise en cohérence des orientations éducatives et pastorales... » S’il juge ces orientations incohérentes, il peut donc les modifier, c’est logique.
2° « Déterminer les modalités d’application […] des délibérations, dispositions et recommandations du comité national […] et de la commission permanente. » Les prérogatives de l’évêque sont ainsi bridées par ces comités à la main du secrétaire général de l’enseignement catholique, lui-même nommé par une conférence épiscopale qui n’a pas d’autorité canonique.
3° « Instruire l’évolution de la carte des établissements et des formations… » Autrement dit, créer, supprimer ou déplacer à sa guise un établissement, comme l’illustrent les affaires de Sévérac-le-Château, de Pas-en-Artois, d’Ambrières-les-Vallées, et tant d’autres ; mais aussi décider s’il est permis ou non à un établissement de proposer une filière, une option, une méthode, qu’il lui est, à l’inverse, loisible d’imposer.
4° « Installer et développer des réseaux d’établissements. » Cela rejoint le point précédent : il s’agit de procéder à l’association ou la fusion entre des écoles, qui, apparemment, n’ont pas leur mot à dire.
5° « Assurer le suivi des financements publics et privés des établissements. » Voilà qui est précieux pour tenir en lisière les récalcitrants, ceux qui oseraient prendre des initiatives contraires aux « orientations » diocésaines, ou régionales, ou nationales, ou encore qui auraient l’idée saugrenue de rechigner à appliquer les réformes ministérielles approuvées en chœur par le secrétariat général et l’Unapel.
6° « Elaborer et arrêter les orientations de politique immobilière. » Voilà un point intéressant, que je me réserve de développer (en même temps que le précédent) quand l’heure sera venue et que le dossier (qui grossit à vue d’œil) sera assez consistant.
7° « Veiller à la formation des personnes. » J’ai assez exposé l’incompétence et l’illégitimité de la direction diocésaine en matière de recrutement pour commenter ici ce point, bien que, dans le principe, il serait le moins contestable de tous s’il était un outil de service et non de mainmise.
Que reste-t-il à décider par les établissements eux-mêmes ? La couleur des murs de la cantine, l’essence de l’arbre planté au milieu de la cour, la date du marché de Noël (s’il n’est pas jugé contraire à la laïcité et à la diversité), le costume en papier crépon des enfants pour le spectacle de fin d’année ?
De cette logorrhée pseudo-juridique, il résulte que la personnalité morale des écoles est un vain mot. A moins qu’elles ne soient tenues par des associations assez solides pour préserver leur caractère propre et résister à l’emprise de la direction diocésaine. Exemples : Stanislas et Gerson (tiens, tiens… ça ne vous évoque rien ?).
Mais ces pouvoirs exorbitants et illégitimes sont attribués au C.O.D.I.E.C., et non au directeur diocésain. Par quel tour de passe-passe ce dernier parvient-il à les exercer lui-même ? Ce qui amène la question suivante : comment se compose ce comité, et qui le dirige ?
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