Au théâtre de Guignol (24/02/2016)
En ces temps de vacances, je propose d’emmener mes lecteurs à une séance du théâtre de Guignol, qui s’est tenue le 13 février à Lacapelle-Marival. Avec tous les personnages préférés des enfants, notamment M. Balmand (dans le rôle de Guignol), Mme Saliou (dans celui de Madelon) et bien entendu l’inénarrable M. Bauquis (dans le rôle de Gnafron, qui lui va comme un gant). Que le spectacle commence !
Ce spectacle, donné sous le nom d’« assises de l’enseignement catholique du Lot, était annoncé dans la Vie quercynoise sous le titre : « L’enseignement catholique joue la carte de la complémentarité avec le public. » On ne peut pas mieux dire que l’enseignement privé sous contrat est devenu le supplétif du public.
Madelon (Mme Saliou), toujours coquette, reste de marbre pendant que les parents d’élèves du Sacré-Cœur de Sévérac-le-Château bataillent pour sauver leur collège, que Gnafron (M. Bauquis) veut purement et simplement rayer de la carte. A elle aussi, il faut poser la question : quel maître servez-vous ? Cela n’empêche pas Madelon, à défaut de nous servir à boire, d’affirmer la bouche en cœur que les parents, dont « le rôle n’est pas moindre », sont « pleinement associés » au projet éducatif, qui a une « dimension commune ». Et elle n’a pas ri. Moi, si.
L’attribut traditionnel de Guignol est un gourdin. Dans le spectacle d’aujourd’hui, il a été remplacé par un autre instrument, tout aussi redoutable : la langue de bois. C’est ainsi que Guignol (M. Balmand), après avoir chanté la « diversité » et la « richesse » de l’enseignement catholique, qui, « marqué par son essence chrétienne », se doit de « proposer autre chose », a appelé à « construire une école catholique utile ». Utile à qui ? Et qui décide de ce qui est utile ? Ce sont des questions auxquelles il ne donne pas de réponse. Mais la réponse, on la devine.
Il faut reconnaître que les dialogues de ce spectacles sont un peu faibles. Il en ressort que l’enseignement catholique est « pleinement inséré dans la république ». Sont aussi énoncés « sept axes » qui sont censés permettre de « construire une école de la fraternité et de l’espérance ». Je ne les cite pas, tant ces notions sont vides de sens et sujettes à n’importe quelle interprétation. Bon, allez, d’accord, je les cite : 1° créer des liens ; 2° promouvoir la personne ; 3° œuvrer pour une gestion équilibrée et solidaire ; 4° assurer une meilleure lisibilité des institutions ; 5° renouveler la communication interne et externe ; 6° placer l’école au cœur de la société et de l’Eglise ; 7° oser la créativité. Le tout résumé dans une jolie brochure.
Et qui était là aussi ? Vous l’avez deviné : le gendarme, dont le rôle était joué par M. Lecuivre, directeur académique des services de l’éducation nationale. Il a appelé à une « nécessaire complémentarité des offres ». Comme la langue de bois n’est pas l’apanage des cléricaux, il invite à construire une école qui « fasse société ». Mais il a aussi demandé qu’il n’y ait « pas concurrence entre public et enseignement catholique ». Après ces belles paroles, il ne sera pas gratifié de coups de bâton, comme le veut la tradition, mais plutôt de coups de brosse à reluire.
En outre, il sera exaucé : dans le département voisin, M. Bauquis souhaite laisser à son homologue le champ libre à Sévérac-le-Château (où il existe un collège public) et lui rendre le service de s’installer à Laissac (où il n’y en a pas). Ni vu, ni connu, je t’embrouille : la grande tradition du théâtre de Guignol !
Petit bémol à propos de ce spectacle. Le titre en était : « Pourquoi une école catholique ? » J’ai peur que cette question soit restée sans réponse.
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