Sévérac-le-Château : arrêt sur image (12/04/2016)

Le lundi 4 avril, le tribunal de grande instance de Rodez, statuant en référé, a nommé un administrateur provisoire à l’O.G.E.C. du collège du Sacré-Cœur. Que faut-il penser de cette décision de justice ? Pour qui est-elle une victoire ? Sans doute pas pour le directeur diocésain, M. Bauquis. Qui toutefois, grâce à elle, passera peut-être à la postérité !

Huitième épisode

Comme ce sont la direction diocésaine, la tutelle congréganiste et l’U.D.O.G.E.C. ensemble qui ont porté plainte, c’est à la question posée par elles que la décision judiciaire apporte une réponse – et, pour l’instant, cette réponse est non. L’O.G.E.C. du Sacré-Cœur, lui, ne demandait rien. Notons que la plainte était portée contre l’O.G.E.C., personne morale – et non contre son président. On peut en déduire que celui-ci n’a pas manqué à ses obligations légales et statutaires, ni mené une gestion mauvaise ou frauduleuse (ce que nul ne lui reproche).

Reste à savoir jusqu’à quel point l’O.G.E.C. doit obéissance au directeur diocésain, à l’U.D.O.G.E.C., à la congrégation de tutelle ou à toute autre personne extérieure à l’association.

L’O.G.E.C. n’est pas une filiale ou une subdivision de l’U.D.O.G.E.C. Cette dernière est la fédération à laquelle adhèrent les O.G.E.C. du département, si bien qu’on peut dire que les O.G.E.C. précèdent l’U.D.O.G.E.C. La fédération a le pouvoir d’exclure de ses rangs une association membre qui ne respecterait plus les conditions d’adhésion. Mais rien de plus.

De même, la tutelle congréganiste est-elle propriétaire du collège ? A-t-il été fondé par elle ? En possède-t-elle les murs ? Est-elle l’employeur d’un membre quelconque du personnel ? Ce qui se passe entre les murs de ce collège est-il contraire à l’esprit de saint François de Sales ou de saint Jean Bosco ? Nul ne le dit. Et si c’était le cas, c’est sa suppression pure et simple, non son transfert, qu’il faudrait demander. Ou encore interdire au Sacré-Cœur de se réclamer de l’esprit des salésiens. Mais rien de plus.

La direction diocésaine enfin est-elle propriétaire de ce collège qu’elle n’a pas fondé ? Est-elle employeur d’un membre quelconque du personnel ? Est-ce auprès d’elle que les élèves sont inscrits ? Non. L’avocat de la direction diocésaine invoque, pour appuyer l’autorité de celle-ci sur le président de l’O.G.E.C., « une certaine obéissance religieuse », expression vague qui ne vient étayer aucun article du droit civil ni du droit canon. Le statut de l’enseignement catholique prévoit que l’O.G.E.C. « reconnaît l’autorité de l’évêque du lieu, de la tutelle, du directeur diocésain ». Chaque fidèle, seul ou en association, reconnaît l’autorité de son évêque telle que définie par le droit canon. Le diocèse est un corps, pas une administration. Son autorité sur une école se borne à dire si, oui ou non, elle est dans la communion de l’Eglise et peut se dire catholique. Mais rien de plus.

Les requérants ont demandé deux choses : la nomination d’un administrateur spécial pour signer l’avenant car « la signature exigée de l’O.G.E.C. est une question formelle » ; et la nomination d’un mandataire général pour gérer et administrer l’O.G.E.C. Cette impérieuse nécessité d’obtenir la signature du président de l’O.G.E.C. prouve que cette décision n’appartient qu’à l’O.G.E.C. M. Bromat, jugeant en référé, a nommé un administrateur judiciaire provisoire pour assister l’association dans son administration et sa gestion courantes, et non pour se substituer à ses membres, ni pour signer l’avenant permettant le transfert (qui ne saurait être une décision courante).

M. Bauquis avait sans doute de bonne raisons, avant le jugement, de se dire « pas très optimiste ». A-t-il raison d’affirmer que le projet sera mené à bien « quoi qu’il en soit » ? Le rectorat avait fixé une date butoir (le 31 mars) à présent dépassée. Le collège ne pourra donc pas ouvrir à Laissac à la prochaine rentrée. Le temps va passer, et bien des choses peuvent arriver. Par exemple, que l’évêque du lieu entende les doléances des ouailles dont il est le pasteur, et ne décide, comme il en a le droit, de révoquer le directeur diocésain.

Et si, en fin de compte, la justice reconnaissait que nul ne peut obliger l’O.G.E.C. du Sacré-Cœur à se saborder, elle révélerait que le pouvoir des directeurs diocésains sur les écoles n’a aucun fondement. Si cette affaire révélait quel néant juridique recouvrent les articles nombreux, touffus et embrouillés du statut de l’enseignement catholique, ce serait un coup de tonnerre. La jurisprudence Bauquis fera peut-être passer à la postérité le nom de cet homme qui aurait peut-être mieux fait d’étudier le droit plutôt que la comptabilité.

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