Moi c’est moi, et lui c’est encore moi (21/02/2017)

Le concepteur de la centralisation de l’enseignement catholique a été la commission épiscopale du monde scolaire et universitaire. L’exécuteur a été le secrétariat général, assisté du comité national de l’enseignement catholique (C.N.E.C.). Pour mener à bien cette conquête, ce duo infernal n’a rien trouvé de mieux que de se répliquer lui-même à l’identique, dans chaque diocèse, sous la forme du C.O.D.I.E.C., instrument de domination du directeur diocésain.

Petite histoire d’une soumission (5)

La première partie du plan de centralisation n’avait réussi qu’en partie. La F.N.O.G.E.C. n’était pas devenue le « ministère de l’éducation » catholique, organisme unique de gestion, signataire unique des contrats, employeur unique des professeurs et (pourquoi pas ?) propriétaire unique des biens des écoles. Toutefois, la fondation de la F.N.O.G.E.C. avait fait disparaître l’U.N.A.E.P., liée à l’Apel. Ce n’était pas un mince résultat, puisque désormais le pouvoir principal passait ainsi des parents d’élèves au secrétariat général.

Le comité national (C.N.E.C.) ne s’en tint pas là. Il entreprit, à partir de 1973, d’exercer une tutelle sur les écoles. Ce qui aboutit en 1978 à la mise en place des comités diocésains de l’enseignement catholique (C.O.D.I.E.C.), sur son propre modèle, mais à l’échelon du diocèse.

Le C.N.E.C. comprend des membres nommés, élus ou cooptés, représentant les organismes de gestion, les recteurs des instituts catholiques, les religieux enseignants, les syndicats de chefs d’établissements et d’enseignants, les directeurs diocésains, etc., etc. En tout, plus de soixante membres représentant des dizaines d’organismes, mais seulement six représentants de l’Unapel. Autrement dit, les parents n’y comptent, en tant que tels, que pour dix pour cent.

Le C.O.D.I.E.C., dont j’ai déjà décrit la composition et le fonctionnement (http://chroniquedelecolepriveedeliberte.hautetfort.com/ar...), est la réplique de cet organisme : une structure où siègent les parties prenantes les plus diverses et d’importances très inégales. Noyé dans cette masse, chacun, au lieu d’exercer ses droits et prérogatives propres, n’est plus qu’une voix parmi beaucoup d’autres, et toujours minoritaire. Sous couvert de collégialité, nul n’a plus aucun droit de veto contre les décisions. Et comme seuls le secrétariat général, les directeurs diocésains et leurs employés se retrouvent dans les arcanes de cette jungle administrative, ils ne font qu’une bouchée des bénévoles qui s’y aventurent. Ils ont ainsi dépouillé les écoles de leur autonomie et les parents de leurs prérogatives.

L’objet du C.O.D.I.E.C. est « d’établir, en accord avec l’évêque, la coordination entre tous les établissements privés d’enseignement catholique du diocèse, pour promouvoir les études et préciser les orientations nécessaires à l’accomplissement de leur mission ainsi que pour assurer la tutelle des établissements diocésains d’enseignement privé catholique ».

Le mot anodin de « coordination », qui apparaît en premier, n’est là que pour faire avaler deux mensonges. Le premier réside dans l’adjectif « diocésain ». Les écoles catholiques ne sont « diocésaines » que si elles sont fondées par l’évêque, comme les écoles cathédrales, les séminaires et les anciens petits séminaires. De même, une école paroissiale n’est paroissiale que si elle dépend du curé de la paroisse. Sinon, toutes les écoles seraient « paroissiales », puisque toutes se trouvent fatalement sur le territoire d’une paroisse. Mais ce n’est pas le cas, et le fait de se trouver sur le territoire d’un diocèse ne fait pas non plus d’une école, fût-elle catholique, une école « diocésaine ». Il s’agit là d’un annexion pure et simple.

L’autre mot clef est le mot « tutelle » : assurer une tutelle, c’est exercer tous les droits en lieu et place de celui qui devrait normalement les exercer. Annoncer une simple « coordination », et finir par parler de « tutelle », c’est abuser de la crédulité du lecteur, le tout oint du qualificatif « diocésain » destiné à attendrir les âmes pieuses.

C’est de sa propre autorité que le C.O.D.I.E.C. s’est attribué des pouvoirs, et des pouvoirs très étendus. Sur les écoles, en se donnant le droit d’imposer les ouvertures, fusions et suppressions ; en mettant en place des services administratifs, pédagogiques, psychologiques, etc. Sur les parents, dont il encaisse par-dessus le marché les cotisations (ce que la plupart ignorent). Sur le personnel, dont il gère le recrutement, la formation et la carrière. Sur les directeurs, qu’il désigne, et qu’il révoque « pour quelque cause que ce soit ». Sur les organismes de gestion, qui « auront à insérer dans leurs statuts la reconnaissance de l’autorité de l’association et admettront dans leurs conseils d’administration, comme membre de droit, un membre du conseil d’administration de l’association. » (Clause pas toujours observée : l’affaire Gerson, notamment, avait pour but d’obtenir l’exécution de cette clause, mais sans succès.) Sur les propriétaires, l’association se donnant pour mission de « représenter l’enseignement catholique dans tous les cas où se pose une question de propriété scolaire, notamment de veiller au respect des intentions des fondateurs et donateurs qui sont à l’origine des propriétés affectées au patrimoine de l’enseignement catholique diocésain ». (On sait comment ces intentions ont été bafouées lors de la suppression de l’école Saint-Charles de Vaugirard.) Sur les congrégations enfin, sur laquelle le C.O.D.I.E.C. exercera le même pouvoir de « coordination ».

Tous voient leurs droits absorbés par le C.O.D.I.E.C. au profit du directeur diocésain. Mais cette organisation n’est que la réplique du C.N.E.C., instrument entre les mains du maître suprême du système : le secrétaire général.

 

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