La recette du bonheur (01/07/2017)

Lorsque M. Balmand prend la parole en public, tout son art consiste à faire comprendre au ministre qu’il est son féal, tout en laissant croire à ses mandants (et cotisants) qu’il défend le « caractère propre » et qu’il fait entendre une voix dissonante. Cette méthode n’est pas seulement un moyen de propagande et de pouvoir. C’est aussi une recette du bonheur. Le résultat est que M. Balmand est toujours content.

On se rappelle comment M. Balmand, imité avec un empressement servile par la petite Mme Saliou qui trottine fidèlement à sa suite, s’était hâté d’approuver la réforme du collège de Mme Vallaud-Belkacem. Professeurs, parents, élèves : tout le monde était mécontent. Mais M. Balmand était content. Il est vrai que, ce coup-là, l’approbation avait été un peu trop précipitée, et que la soumission du secrétariat général au pouvoir politique s’était un peu trop vue. Mais bon, il ferait mieux la prochaine fois.

La prochaine fois, c’est maintenant, car le gouvernement a changé et le ministre aussi. En apprenant le nom de son successeur, Mme Vallaud-Belkacem a fait la grimace. M. Balmand, lui, ne s’est pas départi de son sourire.

Le nouveau ministre détricote la réforme qu’il avait chaudement approuvée ? M. Balmand s’en réjouit et salue une « convergences de vues » qu’il avait déjà saluée avec Mme Vallaud-Belkacem. Il n’oublie pas de faire sa traditionnelle offre de service : c’est ce qu’il appelle la « réflexion partagée ».

M. Balmand avait approuvé les funestes E.P.I. Le nouveau ministre les supprime ? Il est content. C’est toujours la même chose. Et le plus fort est que, quand un ministre annonce ses priorités, M. Balmand s’écrit aussitôt : « C’est justement ce que nous faisons déjà ! » A croire que c’est le ministre qui se met au service, et non l’inverse. La mixité sociale ? C’est justement sa spécialité. L’interdisciplinarité ? Elle n’a pas de secret pour lui. L’instruction civique ? Nul n’est meilleur républicain que lui. L’autonomie des établissements ? C’est son dada. Et ainsi de suite.

M. Balmand n’est certes pas l’inventeur de cette méthode. En leur temps, les mathématiques modernes (aujourd’hui disparues) ou la (funeste) méthode globale avaient été adoptées avec enthousiasme, et la réforme Haby, source de plus grands maux, n’avait pas soulevé la moindre objection.

Le plus fort que que, tout en parlant au nom de tous les établissements catholiques sur lesquels lui-même et sa clique ont étendu leur empire tentaculaire, M. Balmand s’offre le plaisir délicat de plaider pour la diversité, la liberté, le choix. A propos des rythmes scolaires, il dit : « Certains collèges feront ainsi ; d’autres décideront dès à présent de maintenir en l’état l’intégralité de ce qu’ils ont mis en place ; d’autres encore opteront immédiatement pour un plus ou moins large retour à la situation antérieure. Faut-il se plaindre de cette diversité ? Non seulement je ne le crois pas, mais plus encore je m’en réjouis. » Mais si l’on se réjouit de la diversité, ne serait-il pas encore plus efficace de rendre à l’enseignement catholique l’organisation décentralisée et fédérale qui était la sienne avant la loi Debré ? Tout cela a été remplacé par une bureaucratie dont le caractère « collégial » dissimule les agissements totalitaires du secrétariat général. Et, dans le silence, M. Balmand, qui se « réjouit » de la diversité, est en train de faire adopter le « statut unique des maîtres » qui est une nouvelle étape de la centralisation.

M. Balmand est un vieux matou, aussi rusé que Raminagrobis. Mais il ressemble encore plus au chat d’Alice au pays des merveilles, qui disparaît peu à peu au regard jusqu’à ce qu’il ne reste plus que son sourire. Et tout le reste est invisible.

 

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