Les statuts du commandeur (03/06/2020)

La lecture des nouveaux statuts de l’association Saint-Jean de Passy, adoptés le 7 mars 2018, serait instructive si l’on n’en devinait pas d’avance le contenu et l’objet : une opération de mainmise de la part de la direction diocésaine. Mais vérifions quand même, car cette étude apportera un élément essentiel à l’affaire qui nous occupe : constater que ces statuts donnent au coupable tout à la fois un moyen d’agir et un mobile.

Neuvième épisode

Ces statuts ne commencent pas par un exposé des motifs, qui serait pourtant utile pour nous éclairer sur la nécessité de réformer ceux qui donnaient satisfaction depuis 1957.

Ils commencent par une profession de foi dans le système administratif de l’enseignement sous contrat (art. 3) : « L’association… a pour objet la création et la gestion de tous établissements catholiques d’enseignement et d’éducation, reconnus comme tels par l’autorité diocésaine. » La dernière phrase a son importance, car cette reconnaissance n’appartient pas à une vague « autorité diocésaine », mais en propre à l’évêque.

Les membres fondateurs (car il s’agit moins d’une modification de statuts que d’une refondation) sont l’union des anciens élèves, l’autorité diocésaine, représentée par son directeur diocésain (dont on ne sait pas trop s’il est là en tant que représentant de l’évêque ou comme président de l’U.P.E.L.) et l’association des parents d’élèves (art. 5). « Membres de droit du conseil d’administration », ils y ont chacun deux sièges.

Les membres « adhérents » sont« agréés » par le conseil d’administration selon des critères superflus puisque la décision est « discrétionnaire ». Par contre, ils jouissent du droit de « démissionner à tout moment », s’ils n’ont pas été exclus pour « infraction réelle et sérieuse aux présents statuts », « désintérêt manifeste », ou « notamment toute action, prise de position ou comportement incompatible avec les intérêts des établissements », ce qui se traduit par : « Notamment tout et n’importe quoi. »

Les adhérents, nommés et révoqués à discrétion, prennent part à une cérémonie honorifique appelée « assemblée générale » (art. 8), les plateaux de petits fours feront oublier à cette réunion mondaine son caractère de vulgaire chambre d’enregistrement. Les membres fondateurs disposent en effet d’un matelas de 1907 voix (837 pour les anciens élèves, 752 pour l’autorité diocésaine et 318 pour les parents d’élèves) ; les simples adhérents, d’une voix chacun. A noter : les voix cumulées de la direction diocésaine et de l’Apel dépassent assez (mais pas trop) celle des anciens élèves.

Le conseil compte quinze membre au plus (art. 11), six de droit (anciens élèves, direction diocésaine, parents d’élèves) disposant de 90 voix en tout, et neuf autres (ou moins) disposant de deux voix chacun, soit 18 au plus.

Pour l’élection du trésorier et du secrétaire, « le président propose un ou plusieurs autres candidats jusqu’à trouver un consensus » (art. 14), ce qui ne doit pas être difficile : deux membres fondateurs réunissant 60 voix contre 48, les 18 voix des simples adhérents ne seraient pas assez nombreuses, même unanimes, pour donner la majorité à un membre fondateur contre les deux autres. Ce qui fait des anciens élèves des figurants, car un désaccord entre la direction diocésaine et l’Apel serait une configuration stellaire encore jamais observée.

Voici le moment clef (art. 15) : « Le président signe le contrat du chef d’établissement après que celui-ci a reçu sa lettre de mission de l’autorité de tutelle », qui n’est autre que la direction diocésaine. Autrement dit, le directeur est nommé par le directeur diocésain. Voilà qui évitera à l’avenir qu’un M. Clément ne soit nommé en lieu et place de M. Canteneur lui-même, comme ce fut le cas en 2016.

Mais ce n’est pas tout. « Le président recrute, nomme, licencie et assure la gestion et le pouvoir disciplinaire du personnel de l’association et peut déléguer ce pouvoir à un administrateur ou à un salarié. » On apprend donc ici que M. Clément ne recrutait et ne licenciait que par délégation de M. Moreau, qui pouvait la lui retirer et ainsi éviter facilement les fameuses « pratique managériales dysfonctionnelles », si tel avait été le but réel de l’opération.

Cet article pourrait bien expliquer aussi l’augmentation vertigineuse des effectifs de la société de gestion, passés de 97 personnes en 2014 à 2 828 en 2016. Je soupçonne que tous les salariés, enseignants et non enseignants (bien que ces derniers soient rémunérés par l’état), avaient été regroupés au préalable dans une même structure, afin de les placer tous sous l’autorité du président du conseil d’administration, en vertu de ces statuts de 2018.

La préméditation est donc établie, elle est même de longue date, à moins que M. Canteneur ne donne à la refondation de l’association une raison autre que l’intention d’assujettir Saint-Jean-de-Passy à sa seule et unique puissance.

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