La chasse aux « cathos » est ouverte

Dans beaucoup de directions diocésaines, ce ne sont pas les candidats dont les opinions ou le mode de vie sont en désaccord avec la foi, la doctrine ou la morale catholique qui sont éliminés, mais ceux qu’on juge au contraire « trop » catholiques. Cette chasse aux « cathos » ne se fait que sous forme de braconnage. Quelquefois, pourtant, le braconnier se fait pincer…

Les jurys de la C.A.A.C. outrepassent leur droit en jaugeant les compétences (supposées) des lauréats du concours. Mais elles évaluent aussi la conformité des lauréats avec le « caractère propre » et le « projet pédagogique » de l’enseignement catholique. Comme le premier n’est pas défini, et que le second est rédigé dans un style vaseux, le seul mot dont le sens est précis, dans tout ce galimatias, « catholique ». Or ce sont souvent les candidats jugés « trop » catholiques qui sont ostracisés.

A l’issue de mon propre entretien, on m’a déclaré : « L’adéquation de vos valeurs avec celles de l’enseignement catholique ne fait aucun doute. » Ce qui n’a pas empêché la commission de me refuser le préaccord (sans tenir compte du fait que j’enseignais déjà). Cette divination de ma future incompétence est en outre démentie par le fait que j’enseigne toujours. On pourrait me répondre que j’enseigne mal. Toutefois, mon employeur étant un établissement libre, il m’emploie sous contrat de droit privé, qui comporte une période d’essai et offre la possibilité de me licencier. Or, jusqu’à présent, il n’a profité de ces deux possibilités de me chasser. La C.A.A.C. s’est donc trompée dans sa volonté de choisir « de bons professeurs plutôt que des professeurs catholiques », selon l’expression de M. Tercinier – qui, en tant que directeur des ressources humaines, est responsable de cette incompétence.

Mais s’agissait-il vraiment d’une erreur ? Le vrai motif du refus de la C.A.A.C. n’était-il pas justement « l’adéquation de mes valeurs… » ?

Voici un commentaire laissé à propos de l’émission de T.V. Libertés dont j’ai été l’invité en avril dernier : « Témoignage tout à fait authentique, j’ai essuyé le même refus de la D.D.E.C., prétextant que je serais surdiplômée et forcément je ferais ce métier par défaut ; que ma conception de l’enseignement serait en fort décalage avec eux) ; en fait je suppose que c’est plus pour des motifs religieux (être trop pratiquante ou de rite traditionnel). »

Parfois, cette impression devient une certitude. Ainsi, à l’issue de son entretien, un jeune lauréat se fit prendre à part par le président du jury, qui lui déclara : « Les deux autres membres du jury ne vous accorderont pas le préaccord que vous mériteriez, parce que vous avez passé le bac dans un établissement hors contrat. »

Il y a trois raisons principales qui font écarter un candidat catholique. La première : avoir pris part aux manifestations contre le « mariage pour tous » ; la seconde : être issu de l’enseignement catholique hors contrat ; la troisième : fréquenter la messe tridentine.

Ceux qui présentent l’une ou l’autre de ces caractéristiques sont susceptibles d’être considérés comme extrémistes, intégristes, etc. On craint qu’ils s’intègrent mal parmi une masse de professeurs indifférents (ou pire) ; et aussi qu’ils fassent peur aux parents qui inscrivent leurs enfants dans une école privée non pas à cause de son caractère catholique, mais malgré lui. Ce n’est pas bon pour les affaires d’établissements plus soucieux de tirer parti de la déconfiture de l’éducation nationale, que de transmettre la foi – ou, tout bonnement, d’en témoigner.